Alaia Peres (Maison Alaena), l'art de trouver son équilibre

Alaia Peres, l’art de trouver son équilibre 

Issue d’une famille d’entrepreneurs, Alaia grandit avec sa propre vision de l’indépendance « Je viens d'une famille qui est tournée vers l'entrepreneuriat, mes deux parents sont médecins. Autour de nous, personne n’était salarié. »

Après son bac, Alaia Peres étudie en classe préparatoire. Lorsqu’elle intègre HEC,  naturellement, les questionnements sur son avenir professionnel apparaissent « En école, j’étais tiraillée entre entrepreneuriat et conseil. J'ai fait un premier stage en conseil qui m’a fait réaliser que le salariat n’était pas pour moi. 

En 2019, j’ai fait un deuxième stage en Australie, cette fois en start-up. Elle s’appelait Zookal. Là-bas, j’ai rencontré celui qui était mon General Manager, avec qui nous avons rapidement décidé de monter un projet. Quatre mois plus tard, je quittais mon stage pour me lancer dans cette création d’entreprise. Lui a investi de l’argent et moi tout mon temps. Du jour au lendemain, je tenais les rênes de cette boîte. Notre but était de créer des communautés au sein des universités australiennes, pour organiser la vie sociale des étudiants et les mettre en contact. »

Monter une entreprise à l’étranger, beaucoup en rêvent. Mais Alaia Peres, à travers cette expérience, s’est exposée à de nouvelles barrières : « La complexité pour nous c’était le manque de connaissance du marché, le manque de contact… La grosse erreur, c'est de lancer une application en premiers lieux. D'abord, il faut faire des recherches, creuser, et une fois qu’un problème est identifié et que nous sommes sûrs que les individus sont prêts à payer pour ça, le lancement de l’application peut commencer. Pour moi, c'était hyper formateur, tu apprends mieux quand tu fais les erreurs qu'autrement. »

Jumbea, la plateforme de communauté pour l'enseignement supérieur australien s’est rapidement heurtée à un obstacle de taille, qui a remis en perspective ce projet dans la vie de l’entrepreneuse : « Le Covid est arrivé rapidement donc les dépenses allouées par les universités à ce type d’organisation ont été les premières à être réduites. Simultanément, je rentrais en France pour continuer mon master. »

C’est alors que s’amorce un questionnement crucial pour Alaia Peres qui doit décider de la suite de sa carrière :

« Quand je me suis demandée si je continuais sur Jumbea, ce sont les moments difficiles qui m’ont aidé à trancher. En pleine galère je me suis demandée si je souhaitais vraiment me battre pour ça. Et en fait, la tech et l'éducation, ce n'était pas du tout un truc qui m'intéressait au quotidien. À mon sens, pour défendre un projet, il faut que le sujet nous intéresse au quotidien. » 

En parallèle, un désir que chérissait Alaia depuis toujours refait surface : 

« Depuis toute jeune j'avais envie d'ouvrir un lieu avec un peu hybride, entre art et bien-être. J'avais envie d'un projet beaucoup plus concret, que je puisse toucher. 

Je voulais monter un projet où j’étais mon propre client. C’est tellement de stress d’entreprendre que si tu n’es pas fière tous les jours de ce que tu fais, ça ne sert à rien.  »

La création d'un espace physique n’a pas grand chose à voir avec la conception d'un support purement digital. Pour Alaia Peres, l’important était de connaître sa destination. 

« La première chose que j’ai faite, lorsque j’étais encore en Australie, c’est d’écrire une note dans mon téléphone. J’ai rédigé le manifesto de mon lieu, en identifiant ce que je voulais apporter aux gens, le fait que ça soit un espace où l’on se sent bien, pris en charge par des experts… »

Aujourd’hui, Maison Alaena est un lieu dédié au bien être : « Le but, c'est que les gens puissent venir pour se faire du bien, et que nous puissions leur proposer un vrai accompagnement. Que ce soit le besoin de prendre du temps pour soi, ou une problématique dermatologique… Pour cela, nous avons plusieurs pôles :  Le pôle spa avec des soins du visage, des massages. Le pôle cosmétique avec toute notre gamme, mais aussi compléments alimentaires. Et ensuite, les consultations, avec des nutritionnistes, des accompagnements respiratoires et dermatologiques. Il y a aussi des cours de yoga au quotidien. »

Avant que Maison Alaena devienne un tel lieu, la fondatrice a fait face à plusieurs défis opérationnels : marketing d’abord, pour s’assurer un chiffre d’affaires dès le lancement ; locatif ensuite, pour négocier les meilleurs baux commerciaux ; financiers, afin de budgétiser justement le projet… Mais lorsqu’on la questionne sur son parcours, le point le plus exigeant est clair : 

 « Pour moi le plus dur ça a été la partie ressources humaines, et ça l'est encore. Nous avions ouvert un pôle nutrition, donc restauration. Et c’est là que ça a été le plus difficile.  D'ailleurs, ces difficultés m’ont poussé à cesser cette activité, puisqu’en fait, pendant presque un an, j’ai bossé quasiment 7 jours sur 7. La fermeture du pôle restauration a été une libération, malgré le déchirement de voir une partie de l’équipe partir. » 

 « Mon chiffre d’affaires a plus une courbe logarithmique, il monte vite grâce à la communication. Et après, on a un nombre de mètres carrés limité, donc il faut se réinventer ! » 

Après un an d’aventure, l’épuisement se fait ressentir. La créatrice de la Maison Alaena prend le temps d’une remise en question : « Un an après, je bossais encore tous les dimanches. À ce moment-là, je réalise que je n’ai pas monté une entreprise pour ça. Le quotidien que j’avais ne me convenait pas. 

Selon moi, c’est important de réfléchir à son quotidien régulièrement, de réaliser ce qui nous plaît, ne nous plait pas. 

Après avoir retrouvé un équilibre, j’ai débuté une activité de consulting. Aujourd’hui, je réfléchis à l’ouverture d’un deuxième lieu, où je pourrais mieux gérer et appliquer ce que j’ai appris sur La Maison Alaena. »

Pour clore notre entretien, nous avons demandé à Alaia Peres, le conseil qu’elle donnerait à un entrepreneur en devenir qui se cherche encore 

 « Si je devais donner un conseil à celle que j’étais au moment où je suis revenue d’Australie, je lui dirais de mettre le plus de fond possible à la réflexion dès le début, et de ne pas penser que l’on peut tout faire. Il faut faire des choix. Il faut penser son quotidien, le projeter, pour prendre la décision la plus en phase possible avec nous même. Dans cette quête, il faut également faire peser la vie privée. Personne ne peut survivre sans vie privée. Quand je me suis lancée, j’ai travaillé sans arrêt, au bout d’un moment, je n’avais plus de vie sociale, et là ça devient compliqué. 

il faut réfléchir à long terme, et tester, pour savoir. Presque tous les six mois il faut faire un bilan, voir si on est toujours en phase ou non. Concrètement la question c’est “pourquoi tu ne pars pas aujourd’hui ?”. Parfois on se sent pieds et mains liés dans un projet, alors qu’en réalité, nous sommes libres. On ne fait pas de business pour être bloqué dedans. 

Aujourd’hui, je suis quelqu’un qui me projette beaucoup parce que je panique à l’idée de ne pas savoir où je vais être dans quelques années, et en même temps, trop se projeter c’est mauvais car quand on angoisse vite à l’idée de faire la même chose pour les dix prochaines années. Pour me sortir de ce brouillon, je suis allée parler à des gens qui ont eu les chemins qui me questionnaient. Parler aux gens, ça aide. Il ne faut pas se mentir, aucun job n’est facile. Chaque structure a son défaut, il faut savoir celui que tu es prêt à accepter. »

Portrait réalisé par Dare Society