Clémentine Papon, sa vision du futur de l’alimentation, du travail, et du monde demain

Clémentine Papon, sa vision du futur de l’alimentation, du travail, du monde demain 

Clémentine a grandi dans le Val d’Oise, qu’elle quitte après son bac pour rejoindre Versailles, où elle fait sa classe préparatoire. 

“J’ai adoré. J’ai eu la chance d’être dans une prépa bienveillante où on était aidés et accompagnés.” 

Pour la suite, Clémentine est ambitieuse “Mon objectif est de faire de mon mieux et de ne pas avoir de regret, de ne pas me dire “tu aurais pu avoir mieux”.”. Ses efforts paient, puisqu’en 2016 elle intègre l’école HEC, encore curieuse : 

“Quand je suis arrivée à HEC, je ne savais pas ce que je voulais faire. En 3e année, je me suis sérieusement interrogée. Donc j’ai fait des stages pour découvrir le plus de métiers possibles.” 

S’intéressant de plus en plus à ce qu’elle appelle la “nourriture optimisée” Clémentine oriente ses recherches. Elle intègre alors Vitaline, une start-up qui propose des repas optimisés, complets, tout en un. 

“Lors de ce stage, je découvre ce qu’est une entreprise en plein développement, qui va très vite. Et surtout sur un sujet avait du sens. C’est là que la quête de sens commence.” 

“Je savais que la carrière qui m’intéressait était liée au développement durable.“ 

“Pour moi ce qui compte, c’est le produit final de l’entreprise. Je suis flexible sur les missions, sur le métier, mais ce que produit l’entreprise, c’est mon critère numéro un. D’ailleurs aujourd’hui j’entends de plus en plus de gens vouloir faire un métier dans une entreprise dont l’activité n’est pas néfaste pour l’environnement. “ 

Au fur et à mesure, Clémentine finit par s’intéresser à l’industrie des protéines alternatives. Elle rédige par ailleurs un mémoire qui étudie les alternatives à la viande animale. 

Après avoir obtenu son diplôme, Clémentine s'est lancée dans un processus de candidature ciblé, ayant identifié les entreprises et projets qui l'intéressent particulièrement. En 2021, elle a finalement rejoint Gourmey. : 

“Gourmey, lancée en 2019, est la première start-up de viande de culture en France.

Notre premier produit est un foie gras produit par culture cellulaire. On extrait quelques cellules d’un œuf de canard, c’est ce qu’on appelle l’isolation, ensuite les cellules prélevées sont placées dans une grande cuve, qui ressemblent à celles utilisées pour la production de yaourt ou de bière. On les nourrit avec les nutriments nécessaires et naturellement, les cellules se multiplient comme elles le feraient dans le corps d’un animal. En parallèle, on applique notre recette pour passer des cellules récoltées à de délicieux produits finis. 

En trois semaines, on arrive au produit fini, un foie gras de culture. Et en dégustation à l’aveugle, les gens s’y trompent !” 

Chez Gourmey, Clémentine grandit et y découvre de nouvelles missions, de nouvelles formes de collaboration. 

“Quand j’ai rejoint Gourmey on était 16, en comptant les fondateurs. Aujourd’hui nous sommes 50.” 

Désormais, elle en est la Chief of staff. 

“Je travaille beaucoup en binôme avec le CEO. Chief of staff c’est l’adaptation en start up du métier de directeur de cabinet en politique. On est une extension du temps et du cerveau du CEO. Le challenge c’est de faire à 2 ce qu’il gérait seul. C’est une fonction de coordination et de communication interne, puisque nous sommes aussi en lien avec toute l’équipe et les partenaires externes.” 

“Mes missions sont très diverses, je fais le grand écart entre le stratégique et l’opérationnel, c'est là que réside la richesse de ce rôle” 

À ce poste, elle accomplit des missions d’ampleur comme une levée de fonds qui représentait 48 millions d’euros en série A, mais également des tâches de routine : “je m’occupe de la gestion du quotidien avec le CEO, il faut être très pragmatique. Je suis le pense bête du CEO” 

Selon elle, la collaboration et la croissance d’une start up, c’est aussi une question de confiance “Il faut être celui qui peut challenger le CEO, remettre en question certaines choses pour avancer. Le mot clef c’est la confiance. Une relation ne peut pas fonctionner entre le Chief of Staff et le CEO sans confiance” 

A partir de son expérience, Clémentine nous livre quelques perspectives concernant le futur de l’alimentation :

“On parle de plus en plus de protéines alternatives, avec différentes options qui émergent. Aujourd’hui les marques alternatives commencent à être distribuées plus massivement. C’est super. Mais en parallèle, si on regarde les chiffres, il va y avoir une très forte augmentation de la consommation de viande au niveau mondial dans les prochaines années : +70% d’ici 2050.” 

Cette explosion des statistiques est expliquée par l’augmentation du niveau de vie dans de nombreux pays, comme la Chine par exemple. 

Dans beaucoup de pays, la viande est réservée à une certaine élite, sa consommation constitue un symbole. Lorsque les individus ont des revenus plus conséquents, ils consomment mécaniquement davantage de viande. Ce qui est inquiétant quand on prend en compte les modes de production actuellement disponibles : “Il faut se rappeler que la viande est majoritairement produite en élevage intensif. On a tendance à l’oublier, mais c’est une réalité” 

Quant aux solutions qui existent, Clémentine est enthousiaste “Je suis ravie des bonnes relations qui peuvent exister entre les entreprises qui proposent toutes des solutions différentes. Aujourd’hui il n’y a pas de concurrence frontale. L’écosystème est encore petit.” 

“C’est une tendance qui se développe : des conférences en parlent, des fonds d’investissement le mettent dans leurs verticales. Il y a même des fonds qui n’investissent qu’exclusivement dans les protéines alternatives. 

La foodtech répond à des enjeux très intéressants. Mais c’est encore trop centré sur la livraison ou la personnalisation de l’alimentation. Ce qui ne permet pas de répondre aux enjeux cruciaux que nous rencontrons. Il faut davantage parler de circularité, d’alimentation plus végétale, de meilleure gestion des déchets.“ 

Aujourd’hui Gourmey est considéré par certains médias comme un leader de la foodtech française. Engagée pour faire connaître les alternatives disponibles et sa proposition, les membres de l’équipe Gourmey multiplient les interventions, et les rencontres, afin de renforcer les alternatives de demain. 

Pour clore cet entretien, Clémentine nous livre sa vision de la satisfaction et l’accomplissement au travail : 

“Aujourd’hui, j’ai la chance de pouvoir dire que j’ai trouvé ma place. Après pas mal d’itérations et de tests, je suis alignée avec le projet de Gourmey et je m’en sens investie.

Pour retenir les talents, je pense qu’il est important de proposer des valeurs dans lesquelles un individu peut se retrouver. La quête de sens est réelle. Tout comme le fait de travailler sur des projets longue durée, comme nous le faisons chez Gourmey” 

“Mon activisme passe par mon métier.” 

Portrait réalisé par Dare Society