"Une carrière linéaire et toute tracée ce n’est pas ce qui me donne envie, moi ce qui me fait me réveiller le matin c'est d’être utile"
Simplifier l’innovation par le biais de la stratégie au sein des ministères, voilà le défi que se lance Fadila Leturcq. Et c’est à la suite de plusieurs années d’études et d’expériences professionnelles qu’elle travaille dans les services de la Première Ministre et accompagne les décideurs publics à penser leur stratégie numérique. Découvrons le parcours de Fadila Leturcq, celle pour qui servir l’intérêt général est un mot d’ordre.
Fadila Leturcq étudie les langues à l’INALCO en arabe littéraire, puis les Sciences Politiques à Aix en Provence. Son rêve est ici de devenir diplomate au Moyen-Orient. Ces 2 parcours lui permettent d’aller vivre à l'étranger, au Levant, à Damas et à Beyrouth. Mais, à la sortie de ses études, elle se rend compte qu’elle ne veut pas s’orienter vers les concours de fonction publique : elle aspire à découvrir « la vraie vie », la vie en dehors du monde public, deux mondes qui n'interagissent pas assez à son goût. Elle commence donc un stage dans un laboratoire de recherche d'une école en management où elle s’intéresse sur les sujets de management de ressources humaines et y prend goût. Puis elle rejoint Faurecia, une entreprise automobile internationale, et s’occupe de toutes leurs stratégies de talent management en Europe pendant un an. On lui propose ensuite de rejoindre un think tank où elle rencontre et travaille avec des DRH de tout type d’entreprise pour échanger sur des sujets de ressources humaines et apporter un peu d'innovation dans cet univers. Elle participe donc à des ateliers, pour discuter des bonnes pratiques, débattre sur les ressources humaines et aborder des sujets de lobbyings auprès des pouvoirs publics.
Au bout de 2 ans et demi, Fadila Leturcq avait besoin de passer à l’action, de travailler sur du concret pour donner suite à toutes ces discussions. Elle a alors rejoint Deloitte :
« Ça m'a permis, après avoir bien réfléchi avec les DRH, de mettre les mains dans le cambouis, mais aussi d'élargir mes vues. J'ai pu découvrir autre chose que les ressources humaines pures, j'ai fait de la transformation des organisations au sens large. J'ai travaillé sur des questions de gouvernance des entreprises et donc ça m'a permis en fait de prendre un peu de hauteur et de plus être dans la technicité RH. »
Mais au bout de 2 ans, un sentiment d’être enfermé professionnellement la pousse à regarder autre chose. On lui propose un poste à la Direction interministérielle du numérique (DINUM), et dès sa première mission comprend qu’elle travaille sur des missions concrètes qui peuvent faire bouger les choses :
« J'ai accompagné le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la simplification des procédures pour les étudiants par le numérique. Ça a débouché sur la création d’API pour simplifier les procédures de bourse, les exonérations ou les créations de statut étudiant. Et donc l’idée est de se dire comment le numérique peut aujourd'hui alléger la charge du citoyen. »
Elle comprend alors qu’un travail sur les relations interministérielles est indispensable pour permettre de mettre en place les innovations.
« Cela nécessite de faire parler des services entre eux, de réorganiser des façons de faire, ce qui est le plus gros travail finalement. Le clou au travail, c'est un travail de communication et d'organisation, ceux sur quoi je les accompagne aussi. Mais c'est laborieux parce qu’il y a des politiques publiques qui sont profondément interministérielles, des ministères qui ne sont pas organisés de la même façon, qui ne travaillent pas de la même façon. »
Rattachée au Premier Ministre et au ministère de la transformation et de la fonction publique, la DINUM est composée de 180 personnes qui ont plusieurs champs d’action.
« Le premier est d'améliorer le service public délivré aux Français par le biais d’une équipe qui s'occupe du design des services numériques et qui gère ça au quotidien, qui suit la façon dont les démarches en ligne sont délivrées et si elles sont de qualité.
Le second, c’est un département qui priorise à la bonne gouvernance par la donnée qui s'appelle Étalab. On y trouve des data scientists qui font des expérimentations en matière d'intelligence artificielle.
Il y a aussi Beta.Gouv qui identifie des intrapreneurs au sein de l'État qui peuvent proposer un produit numérique qui pourrait répondre à une problématique ou à un besoin rencontré, dans le cadre d'une démarche ou de la mise en œuvre d’une politique publique »
La DINUM prend une grande place dans les engagements de Fadila Leturcq. Elle a aussi été fortement engagée dans le cadre associatif, plus exactement auprès des jeunes de l’IHEDN, l'institut des hautes études de défense nationale.
« Pour moi, ça a été un plaisir d’être dans cette association pendant 4 ans. J'ai d'abord dirigé le Comité Moyen-Orient, parce que c'était ma zone de prédilection. J’ai ensuite été membre du comité directeur pendant 4 ans. Ça a été un de mes plus gros engagements parce que la question de défense, de sécurité internationale, ça a été mon dada pendant mes études. J'ai quitté l’IHEDN il y a 2 ans, mais de cet engagement à découler d'autres engagements.
Le premier, c'est que naturellement j'ai travaillé sur les questions de défense dans cette asso, j'ai voulu m'engager. Tout d’abord, j'ai fait une préparation militaire supérieure en 2018. Puis, j'ai aussi fondé une association qui s'appelle l'école Marianne. J'ai lancé un produit qui s'appelle les task forces où tu rassembles une trentaine de jeunes entre 20 et 35 ans pour les faire travailler sur un sujet d'intérêt, en termes de sécurité et de défense, et proposer aux décideurs publics des actions.
Ensuite, on a créé la Fédération francophone du futur qui se veut être un organe de détection des projets dans l'espace francophone et qui fédère un peu tous les acteurs qui veulent acculturer les jeunes dans l'espace de la francophonie aux grands enjeux de demain.
Et enfin, je me suis engagée dans la Fabrique des mobilités, une association qui a été créée il y a 2 ans pour penser les mobilités de demain et créer des commandes numériques autour de la mobilité. Par exemple des plateformes, faire des expérimentations avec des collectivités territoriales.”
Malgré toutes ces expériences, elle garde toujours un œil critique sur son travail dans l'objectif de toujours progresser.
« L'un des échecs que j'ai vécus a été lors de ma première expérience au sein de Faurecia. Je n’ai pas réussi à embarquer tout le monde dans un projet d'envergure et ça a été une leçon pour l’après.
J’ai appris que l’important c’est partager le projet pour l'enrichir des autres personnes. Ça m’a appris l'humilité, la modestie, et de travailler sur ma façon d'évoluer dans des organisations, d'être un peu prudente aussi, d'analyser le système de valeurs qui existe dans une organisation, d'apprendre à mieux connaître les gens. »